Ce que beaucoup n’auraient jamais imaginé
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Le 19 novembre 1961, Fidel signalait : « Non seulement le sport entretient la forme physique, aide à forger le caractère, à former des hommes à l’esprit et au corps solides, mais il encourage, divertit et rend le peuple heureux. »
Fidel ne saurait tenir dans les limites trop étroites d’un journal, ni d’ailleurs dans celles de notre monde. Il figure, pour des millions d’êtres humains de notre planète meurtrie, parmi ces indispensables dont parlait le poète et dramaturge allemand Bertolt Brecht : « ceux qui luttent pendant toute leur vie. »
Et, bien entendu, aucun stade ne pourrait non plus contenir cette grandeur humaine, également rodée à la pratique du sport. À l’Université de La Havane, ses chronos sur 400 et 800 mètres en firent presque un émule d’Alberto Juantorena, le seul coureur de l'histoire olympique à avoir réalisé le doublé 400 – 800 mètres, aux Jeux de Montréal, en 1976.
Au Collège de Belen, on le vit évoluer sous les paniers, avec son maillot floqué du numéro 6, dévoilant l’étoffe d’un grand joueur par sa vision du jeu, sa précision et sa puissance aux tirs, et ses accélérations dans la zone restrictive adverse.
Ses présences mémorables au Stade Latinoamericano de La Havane, vêtu de son uniforme de baseball, sa passion pour la pêche et la natation, son penchant pour l’escalade, dont il tira profit dans les montagnes Sierra Maestra pour mettre au monde l’une des œuvres les plus humaines qui aient jamais existé : la Révolution cubaine.
Mais, Gilberto Suarez fut peut-être l’un des premiers à avoir découvert les habiletés sportives de Fidel. À l’âge de 17 ans, cet homme né en Jamaïque se mesura à celui qui par la suite allait devenir le guérillero rusé et redoutable. Les deux jeunes se retrouvèrent sur un ring de boxe
improvisé à Biran, le village natal de Fidel. Dans l’exaltation du combat, Suarez esquiva plusieurs attaques et fit étalage de la technique dont il se servait pour gagner sa vie. Le jeune à la peau couleur d’ébène lui plaça un crochet à l’estomac, mettant fin à ce combat inopiné. Mais le
Jamaïquain ne parvint pas à terrasser Fidel. Par contre, quelques années plus tard il allait devenir un véritable champion d’une des plus grandes conquêtes révolutionnaires réalisées sous la conduite de son « adversaire ».
Gilberto décrocha son diplôme d’instituteur et enseigna le chant, le sport et l’anglais.
Suarez est l’enfant d’un peuple qui donna au sport cubain une dimension mondiale, et ce précisément parce que son leader sut incarner et véhiculer comme personne les valeurs de cette expression vitale de la culture sociale. Le 19 novembre 1961, Fidel signalait : « Non seulement le sport entretient la forme physique, aide à forger le caractère, à former des hommes à l’esprit et au corps solides, mais il encourage, divertit et rend heureux le peuple. »
Il en fut lui-même un exemple : « Vous n’imaginez pas combien le sport et les exercices peuvent être utiles pour la vie. J’en ai fait moi-même l’expérience. J’ai eu l’occasion de faire du sport, et le sport m’a aidé à plusieurs étapes de ma vie. Les sports que j’avais pratiqués m’ont aidé dans les moments les plus durs de la lutte révolutionnaire, dans le maquis, où nous devions des efforts physiques énormes », devait-il déclarer en septembre 1964. Et d’ajouter : « Le sport et l’éducation physique ne feront pas perdre de temps aux études, au contraire, ils renforceront les études des élèves ».
C’est sur ces idées qu’il cimenta le sport comme un droit du peuple, et c’est à travers ce prisme que nous avons construit l’avenir qui nous a permis de confirmer peu à peu notre statut de puissance mondiale. En mars 1961, à une époque où il n’y avait presque pas de professeurs d’éducation physique et sportive et où cette activité était réservée à un pourcentage infirme (0,25%) de la population, Fidel signalait que « le sport est une activité appelée à se populariser et à se généraliser dans des proportions que beaucoup ne peuvent imaginer aujourd’hui ».
Plus de 50 000 diplômés de niveau supérieur, des écoles d’initiation sportive dans toutes les provinces, l’Université du sport, l’Institut de médecine sportive, le laboratoire antidopage et plus de 12 000 installations pour la pratique du sport et de l’éducation physique depuis la première année de scolarité, ont permis de réaliser ce qui semblait inimaginable : Cuba figure au 18e rang du classement historique des médailles aux Jeux olympiques : c’est le seul pays d’Amérique latine à figurer parmi les 20 premiers, et le seul des 94 pays, sur les 206 membres du Comité international olympique, à s’être adjugé un titre depuis les premiers Jeux olympiques modernes créés il y a 120 ans. Cuba est l’un des 18 pays à avoir gagné 70 médailles d’or ou plus à cet événement sportif planétaire, l’un des 21 pays à avoir remporté plus de 200 podiums, et la seule nation du Tiers monde à avoir figuré à cinq reprises parmi les 10 premiers du classement général.
Visionnaire comme toujours, Fidel écrivait dans « Médaillé d’or, l’honneur ! », une Réflexion datée du 24 août 2008 : « … soyons honnêtes et reconnaissons-le tous, nous nous sommes endormis sur nos lauriers ». Et ce n’était certainement pas des paroles nouvelles. Il l‘avait averti bien avant dans d’autres de ses réflexions, véritable réservoir d’idées auquel il nous faut sans cesse puiser afin de pouvoir préserver nos conquêtes. En octobre 1975, lors d’un entretien avec notre délégation sportive aux Jeux panaméricains de Mexico, Fidel lançait déjà cette mise en garde :
« Ne pas nous endormir sur nos lauriers est la première chose à laquelle il nous faut penser à l’heure de célébrer nos victoires ». Aujourd’hui, tel doit être notre mot d’ordre dans le sport comme dans n’importe quel autre aspect de la vie.
Et, lors d’une conversation avec un groupe de sportifs, le 22 octobre en 1973, il prononça cette phrase qu’il n’hésiterait pas à répéter avec l’enthousiasme de son éternelle jeunesse de 90 ans : « Savez-vous ce que j’aurais aimé être s’il m’avait été donné de naître à cette époque ? Sportif. »